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Réveil Communiste

Une réflexion historique sur le nationalisme ukrainien et ses "démons"

25 Février 2014 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Ukraine

http://histoireetsociete.wordpress.com/2014/02/25/une-reflexion-historique-sur-le-nationalisme-ukrainien-et-ses-demons-par-danielle-bleitrach/

 par Danielle Bleitrachsur sonblog
25 fév

HITLER/JAEGER FILE

 

Voici en prime de l’analyse historique sur l’Ukraine, quelques photos prises par le photographe personnel d’Hitler qui témoignent de l’extraordinaire capacité de propagande d’un pouvoir… L’article va être émaillé de ces vues sur la manipulation du peuple allemand. Le but de mon blog est de tenter de mettre en évidence le caractère de plus en plus "spectaculaire" du pouvoir, la mise en scène de l’information, et les maîtres dans ce domaine paraissent réellement les nazis qui ont réussi à imposer à un peuple – qui ne leur a jamais accordé quoiqu’on en ai dit la majorité- par un mélange de peur et de mensonges avec une mise en scène, une esthétique de la guerre, leur adhésion jusqu’au bout à la pire des catastrophes. Comme vous allez le voir, si je ne crois pas que le peuple ukrainien soit dans sa totalité nazi, je crains que les rapports de forces ne le conduisent une fois de plus à un destin tragique et l’Europe avec lui.


Avec ce dossier sur les événements ukrainiens, j’opère ce faisant un retour vers mon terrain d’étude, à savoir le rôle d’Heydrich, le bourreau de Prague mais aussi l’homme de la solution finale et celui qui mena les SS, les Einsatzgruppen dans ce que l’on a appelé la shoah par balle dans les territoires de l’Union soviétique. Il m’est apparu intéressant de présenter une perspective historique sur les événement actuels en Ukraine. J’ai voulu exposer quelques conclusions sur l’antisémitisme en Ukraine. Beaucoup de choses ont été dites là-dessus et il est essentiel de démonter les effets de "propagande" de part et d’autres. Entre un BHL, homme de la CIA, qui ne voit pas le moindre antisémite à Kiev et d’autres qui résument la colère populaire à ces seuls nazillons, qui visiblement ont joué un rôle déterminant et continuent à le jouer. Donc la perspective historique peut nous aider à mieux comprendre ce pays et à envisager un avenir qui pour le moment est très préoccupant, une sorte de Syrie potentielle à la frontière de la Russie et de l’Europe, avec des menaces de confrontation.


00812101.JPG

 

Le sionisme est né de la vague de pogromes dans l’empire russe en particulier en Ukraine. Donc il faut procéder à un rappel, ce qui apparait caractéristique est que sur un fond d’antisémitisme religieux populaire entretenu par les églises qu’elles soient catholiques ou orthodoxes, le pouvoir politique conservateur non seulement tolère ces manifestations mais les organise, en sollicite un caractère que l’on décrit comme spontané et atavique. Autre fait difficilement niable, au contraires les forces révolutionnaires ou les résistances sont considérées à tort ou à raison comme judéophiles, l’équivalent de l’affiche rouge. Et le nazisme agit selon la méthode qui fut celle des tsaristes, nous verrons que Goebbels se plaint du fait que le bolchevisme a émoussé le vieil "instinct antisémite" des ukrainiens.


31-11

 

Si l’on considère les événements ukrainiens actuels, il serait sans doute inexact de ne pas voir que la population ukrainienne n’est pas celle des pogromes du temps du tsarisme. Mais il serait tout aussi naif de ne pas voir que l’effondrement de l’Union soviétique s’est opérée selon des lignes forces. Andropov, puis Gorbatchev souhaitaient introduire un multipartisme et pour cela on créé partout à côté du PCUS et issus du PCUS des partis "nationalistes". C’était la seule base sur laquelle pouvait se créer d’autres partis puisque la lutte des classes n’était plus à l’ordre du jour. Avec la décomposition de l’Union soviétiqu, qui n’est pas née à la marge mais bien au coeur de la Russie puisque c’est la fédération de Russie avec son secrétaire Boris Eltsine, qui a mené la restauration et l’éclatement , et les formes diverses de dépeçages des biens public, les partis n’ont plus été que des vecteurs d’intérêts et d’oligarchies en train de se constituer. La population a subi une baisse du niveau de vie dramatique, la remise en cause de tous les acquis et elle a été manipulée par de fausses révolutions de palais. Dans un tel contexte le nationalisme qui en Ukraine s’est accompagné d’un révisionnisme en faveur des anciens nazis a cultivé des formes d’antisémitisme autant qu’anti-russes. Comme les Etats-Unis ont une inquiétude fondamentale celle de ne jamais voir ressurgir la puissance russe partout et ce quelle que soit la couleur politique des dirigeants nord-américains, ces derniers ont provoqué la partition et l’effondrement de l’ex-Union soviétique, qu’il s’agisse des républiques d’Asie centrale ou du Caucase et maintenant de l’Ukraine. Le scénario avec l’aide des vassaux européens a consisté à utiliser un mélange d’élites proches del’Occident, des prévaricateurs et des bandes de nationalistes plus voyous et antisémites qu’épris de modernité. Il ne s’agit pas de l’ensemble de la population, mais bien d’une partie minoritaire mais qui exploite la colère tout à fait légitime de l’immense majorité. La situation ukrainienne a ceci de particulier que les nationalistes néo-nazis et antisémites sont concentrés dans l’ouest, dans la zone dite pro-européenne, celle qui historiquement a appartenu à la Pologne et constitue un creuset historique.


HITLER/JAEGER FILE

 

L’HISTOIRE DE l’ANTISEMITISME EN UKRAINE

 

Les pogromes qui virent la naissance du sionisme

Les Juifs ashkénazes sont présents en grand nombre dans l’est de l’Europe depuis les XIIIe et XIVe siècles. Ils y ont joui d’un statut favorable jusqu’en 1646, date du soulèvement des Cosaques zaporogues et de la population ruthène conduit par Bogdan Khmelnitski. De nombreux massacres secouent l’Ukraine pendant deux ans, touchant les populations catholiques et, plus encore, les Juifs. Près de 100 000 Juifs périssent.

Les Juifs subissent de nouveaux massacres lors de l’invasion de la République des Deux Nations entre 1654 et 1656 par les armées tsaristes. Après l’annexion d’une grande partie de la Pologne par la Russie, celle-ci abrite cinq millions de Juifs. L’antisémitisme est nourri par le vieil antijudaïsme orthodoxe et les préjugés populaires. Des violences antisémites se déroulent encore à Odessa en 1821, 1859 et 1871 mais on ne parle pas encore de pogroms.

La première vague de massacres désignés comme pogroms eut lieu entre 1881 et 1884. Alexandre III, qui succède à son père Alexandre II assassiné, met fin à la politique libérale de ce dernier. Conseillé par son ancien précepteur, Konstantin Pobedonostsev, devenu procureur du Saint-Synode, il mène dès son avènement une politique réactionnaire et antisémite. Les Juifs sont rendus responsables de l’assassinat du tsar précédent. La politique du gouvernement au sujet des Juifs tient dans ce programme : « Un tiers des Juifs sera converti, un tiers émigrera, un tiers périra3 ». En 1881 éclatent plus de cent pogroms : les principaux sont ceux d’Elisabethgrad le 15 avril 1881, de Kiev le 26 avril, d’Odessa du 3 au 5 mai 1880, de Varsovie, alors possession russe entre décembre 1881 et janvier 1882 et de Balta le 22 mars 18828. Les populations locales chrétiennes, soutenues et souvent incitées par la police du tsar, attaquent les communautés juives de la ville ou du village avec l’approbation des autorités civiles et religieuses. Aux destructions et pillages des biens des Juifs s’ajoutaient les viols et les assassinats. La troupe n’arrive souvent que trois jours après le début du pogrom. Le gouvernement russe utilise les pogroms pour limiter les droits économiques des Juifs et les expulser des villages.

Alors que la Russie traverse une grave crise révolutionnaire, une deuxième vague de pogroms frappe les populations juives entre 1903 et 1906. Les plus importants sont ceux de Kichinev le 6 avril 1903, de Jitomir en mai 1905 et de Bialystok le 1er juillet 1906. À Kichinev, où la presse et les autorités alimentent des rumeurs antisémites depuis plusieurs mois, c’est le meurtre d’un jeune chrétien, Michael Ribalenko, qui met le feu aux poudres. Accusés de crime rituel, les juifs subissent un pogrom de trois jours, le gouverneur ayant donné l’ordre à la police de ne pas intervenir. Après le pogrom d’avril 1903, les Juifs de Kichinev organisent des comités d’autodéfense. Cela n’empêche pas 19 d’entre eux de périr lors de nouvelles attaques les 19 et 20 octobre 1903. Isaac Babel a décrit le pogrom survenu à Moldavanka, dans la banlieue d’Odessa, en 1905.

Après la Révolution russe d’octobre 1917, les Juifs de Russie ont continué à être persécutés par les tsaristes et on compte des milliers de victimes de pogroms pendant la guerre civile de 1918 à 1921, en particulier des Juifs d’Ukraine et de Pologne orientale, certains les accusant d’être à l’origine du bolchévisme, donc de la Révolution d’Octobre et parlent alors de judéo-bolchévisme. Des bandes de paysans en lutte contre l’Armée rouge massacrent les Juifs avec l’appui de quelques troupes ukrainiennes. En Russie même, l’Armée blanche de Denikine est à l’origine de plusieurs pogroms dont celui de Fastov le 15 septembre 19198. Pour l’année 1919, les historiens ont recensé 6 000 morts dans les pogroms anti-juifs en Russie.

En tout, la Russie a été pendant cette période le lieu de pogroms majeurs et 349 mineurs, qui auraient fait plus de 60 000 morts8. Les pogroms ont une double conséquence : l’émigration massive de 600 000 Juifs au cours des vingt dernières années du XIXe siècle, vers les États-Unis essentiellement, et la création du mouvement sioniste.


L’ASSAUT DES NAZIS CONTRE L’UNION SOVIETIQUE ET LA SHOAH PAR BALLE


Les persécutions ne progressaient pas seulement au sud-ouestde l’Europe, dans les pays alliés de l’Allemagne, mais également à l’Est, sur les territoires conquis par la Wehrmacht- la propagande disait : libérés du joug bolchevique. mais il ne s’agissait pas ici de législation, mais de meurtres, ainsi que le rapporte, le 10 août, un interlocuteur habituel du ministre, Gunter d’Alquen, Rédacteur en chef de la revue de la S.S, Das Schwarze Korps et stationné sur le front de l’Est, d’Alquen profita d’un bref séjourà Berli pour faire à Goebbels "un rapport circonstancié" sur la situation en URSS, laquelle était "encore plus catastrophique" que prévu. Beaucoup de sujets avaient été passés en revue, puis on parla des pogromes contre les Juifs. Goebbels nota "Dans les grande villes, un châtiment est infligé au Juifs. Ils sont en masse battus à mort dans les rues, par les organisations d’autodéfenses des pays Baltes"(pp44-45)


Florent Brayard. Auschwitz Enquête sur un complot nazi. Seuil janvier 2012


En travaillant sur cette époque, j’ai lu un grand nombre de livres trés documentés, des thèses d’universitaires, la description des faits est souvent insoutenable et le pire a lieu dans les pays Baltes. Il y a de multiples sources qui ont été utilisées à Nuremberg mais aussi le journal de Goebbels qui suit au jour le jour les avancées du "châtiment".

Goebbels à propos de ce qui arrive aux Juifs en Europe de l’est se souvient sans cesse de la "prophétie" du Führer au Reichtag: si la juiverie réussissait à nouveau à provoquer une guerre, elle se terminerait par l’annihilation de la juiverie et il note que cette annihilation est en train de se réaliser comme un juste châtiment (1). Ce qui justifiait le caractère divin de la prophétie aux yeux de Goebbels était l’intervention d’agents non allemands: les juifs mouraient de misère en Pologne, ils étaient tués par les milices baltes, toute l’Europe se liguait contre eux. En fait comme le note l’auteur, les "pogromes" dans la très grande majorité des cas, étaient en réalité tout sauf spontanés. L’une des tâches des Einsatzgruppen lancés par Heydrich à la suite des troupes de la wehrmacht était d’initier secrétement ce type de violence, comme le chef du RSHA (Heydrich second d’Himmler) le précisa dans son instruction aux commandants de ces quatre unités le 29 juin.

LE PIEGE DE KIEV ET BABI YAR

Ce qui nous confronte à la situation contradictoire de l’Ukraine. Notons au niveau des faits que l’Ukraine résiste à l’avancée allemande et que le grand acte de résistance, un piège tendu à l’armée allemande a lieu à Kiev :L’entrée à Kiev et le piège soviétique.

Le 19 septembre 1941, la Wehrmacht entra dans Kiev, qui comptait 900 000 habitants dont 120 000 à 130 000 Juifs.

Les Panzergruppen allemands encerclèrent Kiev pour enfermer une forte concentration de soldats russes. Le 26 septembre 1941, Kiev est prise et plus de 665 000 soldats russes sont faits prisonniers.

Les forces spéciales du NKVD présentes à Kiev connaissant la tactique d’occupation des Allemands avaient préparé un gigantesque piège. L’armée allemande avait pour habitude d’utiliser les installations officielles comme poste de commandements, symbolisant leur prise officielle de pouvoir en s’établissant dans les sièges locaux du gouvernement soviétique mais aussi dans les locaux du Parti Communiste. Ce faisant, le NKVD avait dissimulé plus d’une dizaine de milliers de charges explosives et de mines dans la plupart des bâtiments publics et laissé un commando sur place chargé de les faire sauter une fois les Allemands en position dans l’espoir de décimer le commandement de la Wehrmacht de la zone et renouvelant la longue tradition russe de politique de la terre brûlée.

Les charges furent mises à feu le 24 septembre déclenchant un gigantesque incendie qui dura cinq jours et tua des milliers de soldats allemands6.

Le général de la Wehrmacht Alfred Jodl témoigne lors de son procès à Nuremberg :

« [...] Nous avions à peine occupé la ville, qu’il y eut une suite d’énormes explosions. La plus grande partie du centre-ville était en feu ; 50 000 personnes se trouvaient sans toit. Des soldats allemands furent mobilisés pour combattre l’incendie ; ils subirent d’énormes pertes, car pendant qu’ils luttaient contre le feu, d’autres bombes explosèrent encore… Le commandant de la place de Kiev pensa d’abord que la responsabilité du désastre incombait à la population civile locale. Mais nous avons trouvé un plan de sabotage qui avait été préparé longtemps à l’avance et qui avait listé 50 à 60 objectifs, prévus pour être détruits. Les techniciens ont immédiatement prouvé que le plan était authentique. Au moins 40 autres objectifs étaient prêts à être détruits ; ils devaient sauter grâce à un déclenchement à distance par ondes radio. J’ai eu en mains le plan. »l

Après les attentas de l’avenue Krechtchatik7 perpétrés par les soviétiques du NKVD en plein cœur de Kiev à la suite de l’arrivée des troupes allemandes dans la ville, ce sont les juifs qui furent tenus pour responsables et subirent le massacre qui suivit à Babi Yar.


Blobel préparait donc déjà le 25 septembre la « grande action », soit la liquidation des Juifs de Kiev, à la suite de ces attentats. L’enquête de Michaël Prazan dans le chapitre XII de son livre Einsatzgruppen permet de comprendre comment l’extermination des Juifs de Kiev a été à la fois un projet porté par l’administration nazie et un événement contingent qui s’est adapté aux circonstances particulières de l’invasion des nazis en Ukraine, et notamment à l’entrée de la Wehrmacht à Kiev.


À la suite de ces actes de sabotage, le 28 septembre un communiqué ordonna à tous les Juifs de Kiev et des environs de se présenter le lendemain, jour de Yom Kippour, à 8 heures du matin avec leurs effets personnels, argent, papiers, biens et vêtements chauds rue Dorogojitskaïa. Il était précisé que toute absence serait punie de mort et que tout civil surpris à cambrioler un appartement juif évacué, serait exécuté. Un certain nombre d’habitants de Kiev, juifs ou non, pensaient qu’il s’agissait d’une réquisition de main d’œuvre ou d’une déportation.


Communiqué du 28 septembre 1941, en russe, ukrainien et allemand, ordonnant aux Juifs de Kiev de se rassembler.


Voici une traduction du communiqué :

« Tous les Juifs de Kiev et de ses environs devront se présenter le lundi 29 septembre 1941 à 8 heures du matin à l’angle des rues Melnikovskaïa (près des cimetières). Ils devront être munis de leurs papiers d’identité, d’argent, de leurs objets de valeurs, ainsi que de vêtements chauds, de linge, etc. Les Juifs qui ne se conformeront pas à cette ordonnance et seront trouvés dans un autre lieu seront fusillés. Les citoyens qui pénétreront dans les appartements abandonnés par les Juifs et s’empareront de leurs biens seront fusillés. »


— Anatoli Kouznetsov, Babi Yar, éditions Robert Laffont, 2011, p. 93

Le déroulement du massacre

Babi Yar est un ravin aux abords de Kiev creusé par une rivière qui devint en deux jours le lieu d’anéantissement par les nazis de la population juive de la ville, dans sa totalité, à l’exception des hommes jeunes partis au front, et des rares évacués. Des colonnes de juifs y sont ainsi amenés, brutalisés par les Ukrainiens, forcés de se déshabiller et de s’allonger contre la paroi du ravin de 150 mètres de longueur, 30 mètres de largeur et 15 mètres de profondeur. Dans son ouvrage, Anatoli Kouznetsov recueille le témoignage d’une des survivantes de ce massacre :

« Dina se frayait avec peine un chemin dans la foule, de plus en plus inquiète, et c’est alors qu’elle vit un peu plus loin, tout le monde déposait ses affaires : les vêtements, les paquets et les valises dans le tas de gauche, et toutes les provisions à droite. Les Allemands faisaient avancer les gens par groupe : ils en laissaient passer un, attendaient, puis au bout d’un certain temps en laissaient passer un autre, les comptaient, comptaient … et stop. »


— Anatoli Kouznetsov, Babi Yar, éditions Robert Laffont, 2011, p. 103


Dans son Histoire de la Shoah, George Benssoussan retranscrit le témoignage d’un membre du commando spécial SK4a, Kurt Werner :

« (…) Immédiatement après mon arrivée sur les lieux d’exécution, j’ai dû descendre au fond de ces gorges avec mes camarades. Il n’a pas fallu attendre longtemps avant que les premiers Juifs soient amenés et descendent la pente. Les Juifs devaient se coucher le visage contre paroi du gouffre. Au fond du gouffre, les tireurs avaient été divisés en trois groupes d’environ douze hommes. Les Juifs étaient tous conduits en même temps aux pelotons d’exécution. Les suivants devaient s’allonger sur les corps de ceux qui venaient d’être exécutés. Les tireurs se mettaient derrière eux et les abattaient d’une balle dans la nuque. Je me souviens encore aujourd’hui qu’ils étaient saisis d’épouvante dès qu’ils arrivaient au bord de la fosse, et apercevaient les cadavres. Beaucoup d’entre eux, terrifiés, ont commencé à crier. »

— Ernst Klee, Willy Dressen, Volker Riess, Pour eux, « c’était le bon temps » la vie ordinaire des bourreaux nazis, Plon, 1990, p. 61

Dans les mois qui suivirent, 60 000 exécutions eurent lieu au même endroit sur des Juifs, Polonais, Tsiganes, Ukrainiens.

Après les exécutions de masse, un camp de concentration fut créé à Babi Yar. Les communistes, résistants et prisonniers de guerre y ont été enfermés. Le nombre de victimes du camp est estimé à 30 000.

Durant les deux années qui suivirent, avant que l’armée rouge ne reprenne Kiev, Babi Yar continua d’être le lieu d’un massacre obstiné de la part des nazis : près de cent quarante mille personnes de nationalités variées y furent abattues à la mitrailleuse ou enterrées vivantes : Juifs, Polonais, Tsiganes, opposants aux nazis, malades mentaux, prisonniers de guerre et tous les habitants de Kiev que le hasard des rafles ou les dénonciations destinaient à une disparition sans trace et sans mémoire. Avant leur retraite, les nazis se hâtèrent de brûler les cadavres et de disperser les cendres avant l’arrivée de l’armée rouge, afin d’anéantir la sépulture des hommes. D’autres ravins eurent d’ailleurs la même fonction à travers les territoires occupés.

Si Auschwitz désigne, à l’Ouest, le symbole de la catastrophe pour les Occidentaux, c’est Babi Yar qui pourrait être, à l’Est, le symbole de l’extermination des juifs soviétiques.


L’EFFET DE PROPAGANDE

La propagande nazie à cette époque tend à associer la population à ces massacres, mais la lecture du journal de Goebbels rectifie cette vision:

"Le rapport suivant, au début du mois de novembre, relatait un autre fait qui faisait plus que confirmer l’ampleur des exécutions: ‘l’acharnement de la population ukrainienne contre les Juifs est extraordinairement grand, car on leur attribue la responsabilité des dynamitages de Kiev, tous les Juifs ont été arrêtés et les 29 et 30 septembre, 33771 Juifs ont été exécutés’. De manière symptomatique, le massacre de Babi Yar était présenté comme le juste châtiment d’une crime dont les Juifs n’étaient évidemment pas responsables: et la manière dont il était raconté laissait penser qu’il s’agissait d’une mesure décidée par la population locale et, pourquoi pas, exécutée par elle, puisqu’on s’abstenait de nommer les exécutants. Goebbels n’avait pour sa part pas eu besoin de lire ce rapport pour connaître la vérité. Dès le 18 octobre, un de ses collaborateurs l’informait des gigantesques fusillades de Juifs en Ukraine" demandant du matériel de propagande pour expliquer à la population locale des mesures dont elle ne comprenait pas la dureté. En contradiction avec ce que les nouvelles des pogromes lui avait jusqu’alors inspiré, Gobbels concluait : le bolchevisme a petit à petit émoussé l’instinct antisémite des peuples de l’Union soviétique; nous devons d’ue certaine manière tout reprendre à zéro."(pp59-60) Auschwitz, enquête sut un complot nazi, ouvrage cité.


Ce à quoi, selon moi, nous sommes confrontés est un antisémitisme populaire qui a ses limites mais qui est constamment attisé, utilisé , provoqué pour des raisons politiques, depuis les pogromes tsaristes jusqu’aux massacres nazis, mais sans pour autant s’affirmer pro-sémites, il existe dans la masse de la population un refus de ces horreurs, mais le vrai problème est le repliement, le désespoir auquel est réduite cette masse et que traduit aujourd’hui en Ukraine la baisse de natalité avec une décroissance de la population. Le danger est quand monte comme seule alternative la violence nationaliste qui cherche ses victimes et quand l’Europe et les Etats-Unis vont jusqu’à favoriser cette émergence.


Bernard henry Levy 2

 

Méditez bien cette carte qui décrit l’implantation du mouvement néo-nazi et antisémite Svoboda, il n’a à lui seul la majorité nulle part même s’il fait des scores inquiétants dans la zone anciennement polonaise mais il n’a cessé d’être favorisé par les régimes oligarchiques qui se sont succédés et en particulier ceux de la Révolution orange complètement fabriquée par les Etats-Unis avec l’aide sinon de l’ensemble de l’Europe en tous les cas des gouvernements de droite des ex-pays socialistes, phénomène qui ne concerne pas que l’Ukraine mais est peut-être encore plus préoccupant en Hongrie et dans les pays baltes. De surcroît, il est évident que la volonté des Etats-Unis d’implanter l’OTAN en Ukraine leur a donné un pouvoir d’émeutiers non seulement à eux mais à des forces encore plus radicales face à un pouvoir qui n’a plus aucune légitimité dans une Ukraine divisée et dans un état économique et financier catastrophique.

 

 

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