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Réveil Communiste

Programme nucléaire iranien : un rapport made in USA

3 Décembre 2011 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Impérialisme

sur le site du PTB

 

L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a publié un nouveau rapport sur le programme nucléaire iranien. Comme d’habitude, les réactions internationales sont très agressives. Les États-Unis poursuivent leur campagne contre l’Iran.

Cato Bergman

 

 

Les États-Unis, qui craignent pour leur leadership mondial, augmentent la pression militaire sur l’Iran, clairement visé par le déploiement de forces en Turquie, en Méditerranée et dans le Golfe arabique. Indirectement, c’est la montée de la Chine qu’Obama cherche à endiguer. (Photo U.S. Navy, Kasey Krall)

En entendant les réactions des grandes puissances occidentales, on croirait que l’Iran a abandonné la voie du développement nucléaire pacifique (et légale). Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères américain a déclaré que le rapport contient des « allégations très graves, des accusations sérieuses ». Israël a immédiatement exigé des « sanctions paralysantes », la France, des sanctions « d’une ampleur sans précédent », tandis que l’Angleterre insiste pour que l’option militaire reste sur la table.

Pourtant, ledit rapport ne prouve pas que l’Iran cherche à construire une bombe. Nombre des informations dites « nouvelles » et « révélatrices » auraient en réalité été trouvées en 2004, dans un ordinateur portable volé en Iran. Un ordinateur qui, prétendait-on à l’époque, aurait contenu des documents « secrets » sur le programme nucléaire iranien.

Yukiya Amano, directeur général de l’AIEA, n’a pas osé mentionner l’ordinateur, parce que différents analystes doutent de son authenticité. Mais, même si les informations obtenues en 2004 étaient tout à fait correctes, elles ne disent pas grand-chose sur la situation actuelle. Et, sans surprise, le rapport d’Amano affirme que des activités nucléaires à des fins militaires ont été poursuivies « avant la fin 2003 »! Le rapport ajoute ensuite de manière sournoise que « certaines [de ces activités] pourraient encore être en cours ». Cette phrase cache mal le manque de preuves plus récentes. Plus que le contenu, ce qui frappe est le ton accusateur du rapport.

Une partialité évidente

Le ton accusateur du rapport n'a pas fait l'unanimité parmi les États membres de l'AIEA. La Chine l'a accueilli plutôt froidement. Le Mouvement des pays non-alignés (MNA) s'est demandé pourquoi l'Agence n'avait pas incorporé les commentaires de l'Iran. Le ministère russe des Affaires étrangères a souligné que le rapport ne contient rien de neuf. La Russie a même accusé l'AIEA de vouloir susciter des soupçons sur le programme nucléaire iranien dans le chef des Européens.

En outre, l'agence de presse AFP précise que l’AIEA admet avoir bénéficié de renseignements fournis par différents pays membres – incluant vraisemblablement les services secrets américains et israéliens, pas vraiment des exemples d'objectivité.

Cette contribution de l'Occident aux rapports de l'AIEA n'est pas nouvelle. Mohammed El Baradei, prédécesseur d'Amano, s'était déjà plaint du fait que l'Occident essayait de manipuler les rapports de l'IAEA : « Les Américains et les Européens nous cachaient des documents et des informations importants. Ils ne voulaient pas de compromis avec le gouvernement à Téhéran, mais un changement de régime par tous les moyens nécessaires. »

Amano, l'ami des USA

Cette pression occidentale sur l'AIEA n'a pas été vaine : depuis 2003, l'Iran se trouve constamment sous la loupe de l'Agence. S'interrogeant sur la raison d’un tel acharnement sur l’Iran de la part de l’AIEA, le président iranien Ahmadinejad a rappelé que le budget nucléaire des États-Unis était « de 81 milliards de dollars (...), soit 300 fois le budget de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique ». Ahmadinejad a lancé un défi à Amano : « Préparez donc un rapport sur les États-Unis aussi. Préparez donc un rapport sur les amis des États-Unis ! »

Il est assez improbable que Yukiya Amano relève le défi. Dans un rapport confidentiel publié par WikiLeaks, l'ambassadeur américain à l'AIEA, Glyn Davies, explique qu'Amano a garanti son soutien aux objectifs stratégiques des Américains pour l'AIEA. Il a rappelé plusieurs fois que, bien qu'il « serait obligé de faire des concessions » à d'autres pays, il était « solidement dans le camp américain sur toutes les décisions stratégiques », dont le programme nucléaire iranien.

L'influence directe, à travers la CIA, et indirecte, par « l'amitié » avec Amano, des États-Unis sur ce dernier rapport est indéniable. Elle permet de placer ce rapport dans le contexte d'un véritable siège de l'Iran guidé par Washington.

Mais l'Iran critique aussi la publication par l'AIEA des noms des scientifiques iraniens. En effet, depuis 2010, différents scientifiques iraniens ont été assassinés. Massoud Ali Mohammadi a été assassiné par une bombe placée près de chez lui, Majid Shariari, par un explosif collé sur sa voiture. Fereydoun Abbasi-Davani et sa femme ont été blessés par le même genre  de « bombe collante », et le jeune Darioush Rezainejad, identifié à tort comme lié au programme nucléaire, a été tué par balle devant sa maison. Publier les noms des scientifiques iraniens est donc un acte hautement significatif, qui augmente les doutes sur les intentions véritables d'Amano. Logique, dans un tel contexte, que l'Iran s'interroge sur sa coopération avec l'Agence.

 

Le véritable enjeu du rapport

La guerre en Libye à peine terminée, les États-Unis et l’Europe se tournent vers l’Est. Le risque d’une intervention militaire en Syrie s’accroît de jour en jour. Mais, en réalité, Washington vise bien plus loin.

Les États-Unis craignent en effet surtout la montée de la Chine. Le récent accord militaire entre les États-Unis et l’Australie vise en fait ce pays. Selon la « doctrine Obama », la Chine doit accepter le leadership américain et, si le pays « ne peut pas être persuadé, il sera contraint. » Le nombre de troupes américaines en Australie va ainsi augmenter, et les Etats-Unis auront un plus grand accès aux bases australiennes.
Une autre façon d’augmenter la pression sur la Chine est de viser les pays qui lui fournissent ses ressources naturelles. Or l’Iran est l’un de ses principaux fournisseurs en gaz naturel et en pétrole. L’intégration économique sino-iranienne s’accompagne donc d’une pression croissante sur l’Iran et ses projets énergétiques.
Depuis quelques mois, les États-Unis semblent même se préparer à la guerre contre l’Iran. L’installation d’un bouclier anti-missiles en Turquie a comme objectif principal de bloquer une riposte militaire iranienne après une attaque israélienne. Washington a aussi approuvé la livraison des bombes dites « bunker buster », conçues pour pénétrer des cibles fortifiées ou enterrées, à Israël et potentiellement aux Émirats arabes unis. Les Américains ont, à l’inverse, fait pression sur la Russie pour que celle-ci ne livre pas de missiles de défense aérienne S-300 à l’Iran. (CB)



Sources : The Washington Post, 25 novembre ; Rapport de l’AIEA ; IBTimes, 9 novembre ; Le temps, 9 novembre ; Der Spiegel,
19 avril ; AFP, 8 novembre ; www.guardian.co.uk

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