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Réveil Communiste

Entretien avec Frédéric Pichon : l’Occident s’est complètement trompé en Syrie, on le dit enfin !

2 Juillet 2014 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Impérialisme

 
 Le 27 juin 2014 
 

Entretien réalisé par Gabrielle Cluzel
 

Dans un éditorial du Point daté du 26 juin dernier, Franz-Olivier Giesbert, révèle, s’appuyant sur des travaux d’expert, qu’en Syrie, seuls les rebelles djihadistes ont pu perpétrer l’attaque chimique de Ghoutta. Il accuse ouvertement le Monde, le gouvernement français et les services secrets américains d’avoir montré du doigt, sans preuves, le régime d’Assad, pour justifier les frappes à venir. Cet éditorial aurait dû l’effet d’une bombe, non ?

Si FOG, qui connaît tout le monde à Paris, écrit cela, c’est que désormais, ce thème commence à faire consensus : on peut en parler. Mais cela illustre comment fonctionne notre système médiatique. Les informations ne sortent que quand le système lui-même l’autorise. Et toujours en différé. A présent, cela n’intéresse plus personne. Il s’agit pourtant d’une véritable forfaiture. Fin août dernier, nous avons assisté à une campagne internationale qui, en France, s’est traduite par un vrai déchaînement de la part de certains journaux. En particulier Le Monde, dont la ligne fut incroyablement partisane, comme elle le fut récemment lors de la crise ukrainienne. Le problème c’est qu’en France, c’est ce journal qui donne le la.

 A la fin du mois d’Août 2013, il était très difficile d’aller en sens contraire. J’ai été très sollicité à cette époque : j’ai remarqué que les médias étrangers étaient beaucoup plus disposés à accueillir un discours prudent. En France, je me souviens très bien que le fait même de ne pas acquiescer, d’attendre des preuves, de résister à l’emballement médiatique dont on voyait bien qu’il faisait les affaires du gouvernement était suspect. C’était pourtant la seule position tenable pour le chercheur que je suis et cela aurait du être le cas pour la presse.
 
Vous-même en aviez la confirmation depuis bien longtemps ?

Je vous avoue que sur le moment et jusqu’à maintenant, je n’ai évidemment aucune preuve. C’est plutôt un réflexe méthodologique qui m’a incité à la prudence. Et puis, ce n’était pas très sérieux : le gouvernement syrien demande officiellement à une délégation ONUSienne de venir inspecter pour constater une utilisation d’armes chimiques de la part des rebelles et moins de 48 h après leur arrivée, une autre attaque a lieu dans la banlieue de Damas. Cela pouvait à tout le moins provoquer quelques interrogations.

Mais j’ai senti venir la chose il y a moins d’un mois. Au hasard d’une interview dans Spiegel peu après sa démission de médiateur de l’Onu, Lakhdar Brahimi a indiqué qu’il n’y avait plus aucun doute que l’attaque chimique de Khan al Assal était le fait des rebelles. Or c’est cette attaque au printemps 2013 qui a motivé la demande d’inspection de la part de Damas, qui déjà accusait les rebelles. Mais là aussi, cela est passé pratiquement inaperçu.

En fait, personne n’y croyait dès le début. Mais les liens entre le politique et la presse en France sont tellement contre-nature qu’il fallait servir sur un plateau une intervention qui n’a pas eu lieu. Obama, lui, savait dès septembre à mon avis : cela explique le retournement spectaculaire de Washington et l’annulation de l’opération. Hollande ne pouvait pas l’ignorer non plus…

Pensez-vous que cet aveuglement occidental a contribué à renforcer durablement la capacité de nuisance des djihadistes ?
 
Oui typiquement, il faut tordre le coup à l’ idée suivante : ce serait l’absence de soutien occidental à la rebellion dite « modérée » qui à permis aux djihadistes de prospérer. C’est totalement faux. Pourquoi n’a -t-on pas aidé davantage l’opposition syrienne? Tout simplement parce que dès le début, les chancelleries savaient quels type de rebelles agissaient sur le terrain. Le Quai d’Orsay avait toutes les informations depuis le début.

Avec des rebelles que finançaient et armaient nos amis du Golfe, les gouvernements savaient pertinement qu’il serait impossible de « vendre  » aux opinions publiques une aide à des « révolutionnaires » qui dès le début étaient gangrénés par les djihadistes que la Turquie et d’autres pays voisins laissaient librement circuler vers la Syrie. 

Et j’ai fait partie des experts qui ont mis en garde contre le caractère clairement islamiste de la rebellion en Syrie. Je n’ai eu droit qu’à l’épithète de « pro-Assad ». Alors après coup, on invente des justifications : les djihadistes sont en fait une création du régime d’Assad. Les terroristes sont en fait des membres des services de renseignement. Ou enfin, cette idée très à la mode qui prétend que c’est notre inaction qui explique leurs succès. Des fables grossières qui feraient rire si elles n’avaient provoqué la destruction d’un pays tout entier… et aussi les graves menaces pour notre propre pays, qui détient le record d’engagés djihadistes sur le terrain syrien.
 

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G
<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />             <br /> <br /> <br />             Un document historique d'une haute tenue politique, exemplaire et comportant même, un aspect émouvant.<br />             Exemplaire aussi pour les Français patriotes qui luttent également pour la liberté et la<br />             souveraineté de leur pays trahi et vassalisé.<br />             Ce sont les peuples qui font l'Histoire et le peuple Syrien, héroïque et admirable, le confirme.<br />              Mais Bachar al Assad que l'on peut comparer à un De Gaulle de notre époque, démontre que le rôle des<br />              dirigeants peut être déterminant.<br />              Merci à Mouna Alno-Nakhal pour cette traduction.<br />             Lecture à ne pas manquer. CB<br />             <br /> <br />             Discours d’investiture du Président Bachar al-Assad (texte intégral)<br />             http://www.comite-valmy.org/spip.php?article4799<br /> <br /> <br />
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G
<br /> C'est juste, on devrait dire qu'il a trompé le public.<br />
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M
<br /> Excellent article, mais pourquoi un tel titre complètement faux ? alors que tout au contraire Frédéric Pichon dit que les occidentaux savaient parfaitement ce qu’ils faisaient, qui ils<br /> soutenaient :<br /> <br /> <br /> « les gouvernements savaient pertinemment qu’il serait impossible de « vendre  » aux opinions publiques une aide à des<br /> « révolutionnaires » qui dès le début étaient gangrenés par les djihadistes que la Turquie et d’autres pays voisins laissaient librement circuler vers la Syrie. »<br />
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