Chronique d'une catastrophe annoncée au Japon : deux articles publiés sur Valmy
René Balme
lundi 14 mars 2011, par Comité Valmy
Le Japon vient de connaître la pire catastrophe naturelle de son histoire. Il semblerait, selon les spécialistes, que le mouvement des plaques tectoniques se poursuive inexorablement et risque d’aboutir à un tremblement de terre tout aussi puissant que celui de la fin de la semaine dernière. Nous nous inclinons devant les victimes de ce séisme et du raz de marrée qu’il a provoqué et assurons l’ensemble des japonais de notre soutien.
A cette tragédie, s’en ajoute une autre, consécutive à la folie des hommes et à l’appât du gain caractérisés par une société capitaliste qui, depuis longtemps, ne place plus l’homme, mais l’argent au cœur de ses préoccupations. En effet, alors que ce pays est situé sur une zone sismique très active, connue, reconnue, scrutée et sous surveillance, on est en droit de s’interroger quant à la construction de centrales nucléaires qui n’ont pas résisté à un raz de marrée pourtant prévisible. Même constat pour les complexes pétrochimiques qui ont répandu dans le sol et dans l’eau des quantités inconnues de produits toxiques et de pétrole.
En minimisant délibérément les risques sismiques pour accroitre la rentabilité de ces outils de production chimique, pétrolier et électrique, c’est bien le système libéral et capitaliste qui porte l’entière responsabilité de cette situation dramatique. L’État nippon, les ingénieurs et exploitants, également responsables de ce qui s’annonce comme étant une catastrophe nucléaire et chimique majeure, devront rendre des comptes, pénalement, auprès des populations touchées, de manière durable au niveau local, tout comme auprès de ceux contaminés par un nuage, qui lui, n’a pas de frontière.
Il convient d’exiger de l’État français et de ses partenaires privés dans le domaine du chimique, du pétrolier et du nucléaire, de tirer tous les enseignements de ce qui se passe actuellement sur la côte Est du japon. Plus personne ne pourra désormais se montrer incrédule devant cette réalité. C’est pourquoi nous demandons au gouvernement :
1 - de diligenter d’urgence un audit, réalisé par un ou plusieurs organismes indépendants, afin de connaître le comportement de tous les complexes chimiques, pétroliers et des centrales nucléaires français en cas de séisme, ou de tout autre événement causé par la nature ou par les hommes ;
2 – de rendre public cet audit en le portant à la connaissance du plus grand nombre afin d’ouvrir un véritable débat national autour des questions énergétiques et des choix qui doivent en découler ;
3 – de prendre, au plus vite, toutes les mesures nécessaires pour garantir l’intégrité physique des biens et des personnes, en édictant de nouvelles normes qui garantissent la sécurité de ces complexes pétrochimiques et des centrales nucléaires en prévision de toute catastrophe, ou autre risque naturel, susceptible de se produire à court, moyen ou long terme.
Notre propos n’est pas d’instrumentaliser le drame qui se joue au japon.
Il consiste à dire, avec force, que l’homme doit être toujours placé au centre de toutes les préoccupations, et qu’il convient que l’État, dont c’est le devoir régalien, prenne les dispositions utiles pour prévenir les risques technologiques et naturels en faisant abstraction de la rentabilité à court terme, du CAC 40 et de la financiarisation qui est un obstacle majeur à l’épanouissement de l’être humain et à la préservation de son intégrité physique et morale.
Pour ce faire, le service public doit être renforcé, les élus doivent retrouver le pouvoir que leur confère le suffrage universel qui, aujourd’hui, leur est retiré au profit d’une administration toute puissante et coupée des réalités quotidiennes.
René Balme
maire de Grigny
Le 14 mars 2011 17h00
Communiqué de l’Arc Républicain de Progrès
A la suite du séisme qui a frappé le Japon, au moins trois réacteurs nucléaires sont l’objet de très graves incidents dans ce pays.
Ces réacteurs sont de conception états-unienne ancienne. Ils ont plus de 40 ans, pas de bâtiment réacteur en protection renforcée (toit plat et non en coupole demi sphérique), pas de circuit intermédiaire pour l’évacuation de la chaleur (fabrication de la vapeur-réacteur dit à eau bouillante- dans la cuve du réacteur lui- même et non par des générateurs de vapeur extérieurs), etc. La compagnie qui exploite ces réacteurs, TEPCO, est une société dont 97% du capital est privé, dont les actionnaires sont japonais ou étrangers, des particuliers ou des institutions financières. Cette compagnie a déjà défrayé la chronique les dernières années.
Cette grave situation confirme notre vision du nucléaire civil pour notre pays, selon laquelle l’énergie nucléaire est une entreprise trop sérieuse pour être laissée aux mains des capitalistes et à leur logique de profit maximum immédiat ou de concurrence libre et non faussée. Il y a donc une urgence nucléaire en France : Abolir la loi NOME et la concurrence pour la production et la distribution d’énergie, rétablir le contrôle de la société, en l’occurrence de l’Etat, sur cette ressource, réaliser le retrait de l’actionnariat privé qui impose la productivité maximale.
Car c’est seulement ainsi que l’on peut redonner toutes les ressources à EDF devant redevenir publique, et non à des actionnaires et des firmes privées (ex : Direct Energie, Poweo, Suez) qui exigent la vente à bas prix, au détriment d’EDF, du courant dans les centrales, dont le gouvernement vient d’autoriser la prolongation de la durée de vie de 40 ans à 60 ans. Les bénéfices de cette autorisation doivent être gardés par EDF, pour payer les investissements de sécurité concernant lignes, barrages et les centrales, ainsi que la recherche et les études. Les lois et traités criminels, absurdes, imposant l’"ouverture à la concurrence" doivent être dénoncés, en particulier pour des raisons de sécurité nationale mais aussi, internationale.
En effet, le coût de l’électricité nucléaire est essentiellement celui de la sécurité. Or la mise en concurrence ne profite qu’aux investisseurs, et aux très gros consommateurs industriels, seuls à même de faire jouer la concurrence. Les salariés sont soumis aux pressions et au harcèlement, les consommateurs victimes des ententes et monopoles de fait (sur un territoire). Cette plus - value exigée par les investisseurs se fait donc au détriment de la sécurité.
Remarquons que tous les partis, en particulier les écologistes, ont accepté le traité de Maastricht, qui met en place cette concurrence. Ces derniers s’en font même les héros, au nom de l’Europe et de leur lutte contre les lobbys, surtout s’ils défendent les intérêts de l’Etat français.
Enfin cette mise en concurrence se fait par la destruction des savoir-faire et de la souveraineté sur les composants et les systèmes : par exemple, la fabrication des générateurs de vapeur de nos centrales est désormais confiée aux chantiers navals japonais de Kobé, suite à ces appels d’offre internationaux imposés par Bruxelles, amenant ainsi la désindustrialisation et la mise en danger de la population.
La politique énergétique de la France et sa sécurité impliquent manifestement le rétablissement de la souveraineté populaire et de l’indépendance nationale ainsi que la nationalisation démocratique de ce secteur stratégique. Cette ré-appropriation publique d’EdF devrait selon nous, bénéficier d’une gestion tripartite, Etat- salariés -usagers.
Le peuple de France qui est en état de légitime défense d’être exposé à des risques majeurs, suite à des décisions prises par des instances européennes illégitimes où la logique financière prime sur la sécurité des populations, devra imposer sa consultation directe par référendum, aux représentants de l’oligarchie financière mondialisée au pouvoir dans notre pays. Cette consultation pourrait être éventuellement, un référendum d’initiative populaire posant la question au peuple - nation du rétablissement définitif du secteur public de l’énergie.
Paris, le 14 mars 2011