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Réveil Communiste

Bilan démocratique de l'Assemblée extraordinaire : deuxième journée

11 Janvier 2008 , Rédigé par Olivier

Rappel de l'épisode précédent.

(Disponible en un simple clic : Bilan démocratique de l'Assemblée extraordinaire : première journée et Bilan démocratique de l'Assemblée extraordinaire : l'intégrale.)

Après avoir essayé de répondre à deux premières questions ("Qui étaient les délégués ?" et "Comment le travail préparatoire des sections a-t-il été pris en compte ?") j'ai commencé à essayer de répondre à la question la plus importante ("Comment le mandat a-t-il été élaboré ?")

Cela m'a conduit à raconter la soirée du samedi 8 décembre.

J'écrivais en particulier :

"La discussion sur le mandat a commencé pendant le travail en ruche. La feuille de route prévoyait une demi-heure seulement pour cette description. Rares sont les tables qui ont pu aller plus loin que des remarques d'ordre général. Le temps a manqué pour réfléchir à des amendements à ce moment-là."

J'expliquais ensuite pourquoi la commission des mandats était trop nombreuse, trop dirigeante et trop parisienne.

Je racontais enfin le déroulement de cette commission des mandats, et la manière dont elle fut congédiée, sans avoir décidé du moindre amendement, vers deux heures du matin. Il apparaissait en effet qu'il n'était pas possible de travailler à plus de cent.

Je m'arrêtais là dans ma description. Je n'avais jusque là évoqué que la première journée.

Il me faut encore ajouter ceci avant de passer au dimanche matin :

Commentaire : Les organisateurs de l'Assemblée extraordinaire n'ont-il jamais travaillé sur un texte ? N'ont-il jamais eu à mener un travail d'amendements ? Qui pouvait croire qu'une demi-heure de discussion dans chaque ruche, et la réunion de plus de cent délégués issus de ces ruches aurait pu permettre d'amender le texte collectivement ?

Tout me laisse penser, sur ce point, que tout a été organisé pour exclure les délégués des sections du travail d'amendement concret du texte. Tout a été organisé pour que les quelques dirigeants chargés du mandat gardent un entier contrôle du processus jusqu'à la fin.

Pourtant, cela n'a pas empêché la tribune de faire croire que le texte amendé pendant la nuit était le résultat du travail des délégués désignés par les ruches.

Quelques délégués ont tenté de dire le lendemain en séance plénière comment s'est passé la réunion de la commission des mandats. Ils n'ont pas réussi à se faire entendre.

Je peux maintenant passer véritablement à  la...

Deuxième journée : dimanche 9 décembre 2007

Suite de la réponse à la question : Comment le mandat a-t-il été élaboré ?

Description : D'après le programme, la matinée devait commencer à 9 heures pour travailler directement sur le mandat, pendant trois heures et demi : "9 h – 12 h 30 : Séance plénière. Débat pour l’adoption du mandat donné à la direction nationale. Vote sur le mandat. Lors de cette séance, seul-e-s les délégué-e-s seront appelé-e-s à se prononcer par leur vote sur les décisions à prendre. - Compte-rendu des synthèses thématiques" À neuf heures, il n'y a pas grand monde, mais le texte amendé par Patrice Bessac et Marie-Pierre Vieu pendant la nuit est sur toutes les tables.

Les travaux reprennent véritablement vers 9h45, mais pas par le travail sur le mandat ! On commence par le compte-rendu des synthèses thématiques. Les délégués des ruches qui ont pu se réunir à propos des sept thèmes (combien étaient-ils ?) ont produits sept synthèses. Nous écoutons donc sept interventions à la tribune. Certaines ne sont pas très synthétiques, et se contentent de lister des remarques, parfois contradictoires, qui ont été faites par les délégués. D'autres sont plus affirmatives, mais il pourrait être intéressant de les relire. Elles disent peut-être l'une ou l'autre choses qui contredisent le mandat. De toute façon, il n'y a aucune articulation entre ce travail et le mandat.

On aurait pu d'ailleurs travailler à ce moment-là sur le mandat. Mais non. Il faut d'abord écouter un invité !

Il est 11h passées lorsque le travail sur le mandat commence. Patrice Bessac fait le rapport du résultat des travaux "de la commission des mandats". Il explique de manière assez vague le déroulement de la nuit. Il insiste surtout pour dire qu'il a fini vers six heures du matin. Mais surtout il indique qu'une phrase de l'avant-projet de mandat, rayée sur le document que nous avons sous les yeux, doit en vérité être rétablie ! Il s'agit de la phrase : « Il ne s’agir d’exclure aucune hypothèse concernant le Parti ou sa stratégie…. Il s’agit de permettre le réflexion et l’expérimentation sur la façon dont ces rassemblements peuvent s’élargir, s’approfondir et construire ainsi durablement des rapports de force favorables à l’émancipation humaines. » Émotion dans la salle.

Commence alors la discussion générale. Pour avoir la parole cette fois-ci, il ne faut pas s'inscrire, mais faire la queue derrière l'un des six micros de la salle. On écoute une première personne à chaque micro, puis une deuxième personne à chaque micro, et ainsi de suite. Ceux qui ont été les plus rapides au moment de se précipiter vers les micros ont donc pu parler. Les autres ont fait la queue en vain.

La présidente de séance (un mois plus tard j'ai oublié son nom) ne préside pas. Elle se contente de dire "micro 1", "micro 2", etc. Elle ne donne aucune consigne à propos du temps de parole de chacun.

Les premiers intervenants en profitent donc pour faire chacun plusieurs propositions d'amendements, en plus de dire parfois leur sentiment sur l'organisation de l'assemblée extraordinaire. Réponse de la présidente : "micro 3", "micro 4", etc. Les propositions d'amendement restent des propositions en l'air. De toute façon, aucune méthode de travail n'a été proposée.

Un jeune camarade de Villeurbanne intervient de manière très violente contre la direction. Il dénonce la manière dont s'est passée la commission des mandats, il appelle au rassemblement des communistes contre la liquidation
et invite à signer une pétition qui réclame, pour finir, le rétablissement de la faucille et du marteau comme emblème du parti communiste. Très forte émotion dans la salle.

Marie-George Buffet, assise à la tribune mais silencieuse jusque là, se saisit alors du micro, la voix pleine d'émotion et en appelle au respect et à l'unité des camarades. Son intervention trouve un très large écho.

D'autres interventions de délégués suivent. On découvre alors que Marie-George Buffet n'a pas abandonné le micro dont elle s'était saisie. Elle assure désormais la présidence de séance, et propose des votes sur certains amendements proposés par les délégués.

De temps en temps, elle retient une proposition, donne son avis, et fait voter la salle à main levée. La salle vote toujours dans le sens qu'elle propose. Elle commence d'ailleurs par les amendements les plus consensuels.

Mais elle n'intervient pas après chaque nouvelle proposition. Elle laisse le plus souvent passer plusieurs interventions de délégués, avant de soumettre au vote un, deux ou trois amendements parmi ceux qui ont été proposés. Les autres sont oubliés.

Paul Boccara propose alors un amendement visant à clarifier et à délimiter les expérimentations politiques que pourrait mener le PCF en 2008 : « ne pas entamer, avant le congrès de 2008, de démarche de création d'une nouvelle force politique ».

Marie-George Buffet ne peut pas éviter un vote sur cette proposition. Mais elle reprend d'abord une proposition qui va dans le même sens, mais de façon beaucoup moins claire, en déplaçant la phrase "il ne s'agit d'exclure aucune hypothèse" et en faisant disparaître le mot "expérimentation" du texte. Elle se dit favorable à cette première proposition et la salle l'adopte. Elle dit ensuite que ce première vote rend la proposition de Paul Boccara inutile et propose de ne pas la voter. Des voix s'élèvent pour réclamer le vote. Le vote a lieu. La salle, majoritairement convaincue de l'inutilité de cette proposition à cause du vote précédent, vote contre. On peut noter que les dirigeants présents à la tribune votent contre également.

Je ne sais plus si c'est à ce moment-là ou plus tôt dans la séance, mais je me souviens que Marie-George Buffet a manifesté sa fatigue et son agacement à un moment, en disant : "vous voulez qu'on vote à bulletins secrets et que cela nous prenne une demi-heure ? C'est cela que vous voulez ?" Ce qui est sûr, c'est qu'elle l'a dit à des camarades qui pouvaient à ce moment-là passer pour minoritaires.

Le temps passe. On nous propose de supprimer la pause de midi et de finir plus tôt. Il restera encore cependant, après le vote du mandat, à écouter quelques interventions, dont un discours de Marie-George Buffet.

La fatigue et la faim font leur oeuvre. La salle est de moins en moins attentive aux propositions des délégués. On vote de moins en moins. Et on vote beaucoup plus souvent contre, pour en finir.

Vers 13 heures, la tribune peut proposer d'en rester là pour les propositions d'amendement.

On passe au vote sur l'ensemble du texte. Il y a des urnes dans la salle mais personne n'a demandé le vote à bulletins secrets. On vote donc à main levée. Les membres du Conseil National participent tous à ce vote, comme ils ont participé à tous les votes sur les amendements. Le programme précisait : Lors de cette séance, seul-e-s les délégué-e-s seront appelé-e-s à se prononcer par leur vote sur les décisions à prendre. Mais peut-être les membres du CN étaient-ils considérés comme des "délégués", au même titre que ceux qui ont été désignés par leurs sections, et par opposition aux "invités" ?

On compte les mains levées :

POUR 852 (72.26%)  CONTRE 241 (20.45%)   ABSTENTIONS 86 (7.29%)

On entend ensuite André Chassaigne et Marie-George Buffet et l'on chante l'Internationale, mais cela n'a plus rien à voir avec le mandat définitivement adopté.

Adopté définitivement ?

En fait, non...

Commentaires : Qui décide la nuit ? Marie-Pierre Vieu et Patrice Bessac. Qui décide le jour ? Marie-George Buffet. Quant aux délégués, ils peuvent bien faire la queue derrière leurs micros.

Ce premier commentaire est trop abrupt. Certes. On me dira que les délégués ont voté, et qu'ils ont voté pour le mandat, sans ambiguïté. Mais ils ont voté fatigués par cette longue discussion trop souvent confuse. Ils ont voté au nom de l'unité des communistes. Ils ont voté parce que, une fois de plus, le texte proposé était un texte de compromis qui essayait de satisfaire tout le monde à la fois. Ils ont sans doute aussi voté pour qu'un texte sorte de cette assemblée extraordinaire. Si le vote contre l'avait emporté, cela aurait été l'aveu que ces deux jours n'avaient pas permis d'avancer. Pouvions-nous retourner dans nos sections sans texte ?

Rien n'a été fait pour que les questions les plus sensibles soient débattues et sereienement tranchées. Rien n'a été fait pour que les communistes puissent y voir plus clair à propos de l'avenir de leur parti.

Tous les sujets conflictuels, qui ont parfois été sources de tensions pendant l'assemblée extraordinaire, ont été étouffés par les organisateurs.

À l'avenir, il faudra se donner des règles beaucoup plus précises pour produire et amender nos textes de références, et il faudra avoir la volonté de mettre en avant nos désaccords, de façon à trancher quand cela est nécessaire. Sans cela, nous ne pourrons pas aller de l'avant.

Épilogue : mardi 11, mercredi 12 et jeudi 13 décembre 2007

Description : Mardi 11, par internet, et mercredi 12, dans Communistes, le mandat est publié. Surprise ! Il ne commence pas par les mêmes mots que le texte amendé et adopté au cours de l'assemblée extraordinaire. La première phrase commence par "La riposte au capitalisme" au lieu de commencer par "le combat contre le capitalisme mondialisé".

On apprend par courrier électronique, l'après-midi du 13 décembre, qu'il s'agit d'une erreur de copier-coller. Mais cet erratum n'est pas suivi d'un erratum dans Communistes, et si l'erreur a été corrigée sur le site national du PCF, elle subsiste sur la plupart des sites fédéraux.

Commentaire : Y avait-il un secrétariat de séance, chargé de noter précisément tous les amendements adoptés ? Cette erreur laisse penser que non.

Commentaire d'ensemble :

Le PCF est-il à ce point incompétent et irresponsable, pour organiser si mal une telle assemblée ?

Ou cette désorganisation est-elle voulue par certains dirigeants ?

Qu'elle soit volontaire ou non, il est certain qu'elle diminue considérablement le pouvoir des délégués de sections, et par conséquent celui des militants qu'ils représentent, et qu'elle renforce le pouvoir d'une direction qui n'a pourtant pas brillée par ses succès ces dernières années.

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O
Personne n'est venu m'accuser de voir le mal partout et de déformer les faits. Mon bilan est décidément trop long.Plus sérieusement, personne n'a proposé de correctif ou apporté des précisions. J'attends encore un peu avant de réunir les deux moitiés du texte pour que soit disponible une version intégrale.Il faudrait aussi avoir le courage de faire un travail du même ordre sur l'enchaînement de décisions et de non-décisions qui ont conduit les communistes parisiens à voter si nombreux pour l'alliance avec les socialistes dès le premier tour. Ce fut encore une belle victoire de la démocratie molle, dans laquelle la direction fédérale a eu d'autant plus de poids que le choix à faire n'a été exprimé clairement que beaucoup trop tard, au moment du vote final, moins de deux mois avant le premier tour.
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G
Bravo à Olivier pour ce patient travail de restritution quasi archéologique d'un moment que la confusion entretenue, la fatigue et un certain dégoût pousse à oublier au plus vite. Et c'est justement ce qu'il ne faut pas faire! (tout comme il ne faut pas, écœuré par ces pratiques, rendre sa carte, c'est justement le but poursuivi) Il y a aussi un autre aspect étrange de cette manifestation ; comment expliquer la quasi absence de médiatisation? C'est tout de même un peu fort de faire venir 1500 communistes pour que personne n'en parle! Sans doute avait-on un peu peur de ce qu'ils auraient pu dire, s'ils n'étaient pas resté sagement à attendre derrière leurs micros leur tour de parole qui n'est pas venu.
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